Variances.eu prend l’initiative de partager avec vous le communiqué que l’Insee a publié le 26 mars.

Il y a des circonstances exceptionnelles où les statisticiens doivent improviser pour informer sans déformer. 

Nous félicitons l’Insee qui joue ainsi pleinement son rôle dans ce malheureux contexte.

Nous trouvons que l’Insee expose de manière convaincante la difficulté de devoir fournir des estimations tout en étant parfaitement conscients de leurs limites. 

Nous en profitons pour saluer nos collègues statisticiens-économistes qui continuent vaillamment à produire leurs analyses.


Introduction de Jean-Luc Tavernier, directeur général de l’Insee

Il y a dix jours, l’Insee a fait savoir par communiqué de presse que la Note de conjoncture de mars était ajournée et que l’Institut se donnait pour objectif de faire une évaluation de la situation
économique toutes les deux semaines.

C’est aujourd’hui jeudi 26 mars que nous publions une première évaluation, en même temps que nous publions, comme chaque mois, les résultats des enquêtes de conjoncture.

Ces enquêtes sont en forte baisse, mais elles ne suffisent pas à prendre la mesure de la chute d’activité puisque les réponses des entreprises ont été pour la plupart collectées avant le début du confinement.

Nous avons donc eu recours à d’autres sources d’informations, parfois quantitatives, parfois uniquement qualitatives, et à des méthodes inhabituelles. Nous avons bénéficié pour ce faire du soutien et de l’aide d’organismes très divers que je tiens à remercier : la Banque de France, le Groupement Cartes bancaires CB, toutes les entreprises et fédérations professionnelles qui ont transmis des informations via la Direction générale des entreprises, France Industrie, le Medef et Rexecode, ainsi que l’OFCE. Et nous pensons être en mesure de donner un ordre de grandeur de la perte d’activité, instantanée, par rapport à une semaine normale, par rapport à ce que nous aurions pu attendre.

J’ai cependant hésité avant de donner mon feu vert, pour deux raisons.

La première, c’est qu’il peut apparaître dérisoire de mesurer l’activité économique quand la préoccupation première est d’éviter une catastrophe sanitaire. Le temps est au suivi de l’épidémie et à l’expertise de santé publique, certains pourraient être choqués de l’attention qui est également portée aux grandeurs économiques. Cependant, il me semble indispensable de mesurer le choc que connaît l’économie, indispensable aux décideurs, indispensable aux acteurs économiques. Et même si l’Institut statistique devait rester muet, d’autres avanceraient de toutes façons leurs estimations.

La seconde, c’est qu’un statisticien répugne à donner un résultat dont il n’est pas suffisamment assuré. Et c’est peu de dire que ce que nous présentons aujourd’hui est fragile, susceptible d’être révisé. D’abord parce que nos méthodes dans une telle situation ne sont pas éprouvées : c’est inédit dans l’histoire de l’Insee. C’est fragile aussi parce que la situation elle-même est très évolutive : dans certains secteurs industriels et dans les travaux publics, l’activité reprend après s’être interrompue ; dans d’autres secteurs, par exemple dans les services aux entreprises, le creux n’est sans doute pas encore atteint. Quoi qu’il en soit, pour incertain et imprécis qu’il soit, il m’a semblé que donner ce premier ordre de grandeur était préférable à ne rien dire du tout.

A l’heure actuelle, nous estimons ainsi que l’activité est à environ 65 % de la normale. Je n’ai pas voulu que nous donnions une estimation de la croissance du PIB trimestrielle et a fortiori annuelle. Cela dépendra notamment de la durée de cette période de confinement, que nous n’avons aucune légitimité ni aucune compétence à prévoir. La publication donne plusieurs hypothèses pour fixer les idées. En matière de consommation, nous estimons que la consommation totale des ménages français s’établit actuellement aussi à 65 % de la normale, avec des différences sectorielles évidemment très marquées. Dans ce premier exercice, nous n’avons pas essayé d’évaluer d’autres grandeurs.

Le bureau de presse de l’Insee fonctionne. Nous serons plusieurs à être joignables aujourd’hui pour répondre aux questions, mais il ne faut attendre aucun chiffre supplémentaire.

Je tiens pour finir à remercier tous ceux qui ont contribué à cet exercice exceptionnel, d’autant qu’ils l’ont réalisé dans un temps record et dans des conditions inhabituelles puisque nous télétravaillons tous depuis notre domicile.

Cet exercice sera réédité, et si possible approfondi, dans deux semaines.

Lien vers le point de conjoncture du 26 mars 2020 de l’Insee

Jean-Luc Tavernier

Contact : Bureau de presse de l’Insee – bureau-de-presse@insee.fr