Investir en Afrique, des opportunités
Les atouts du continent africain
L’engouement pour l’investissement en Afrique s’explique principalement par les fortes perspectives de rentabilité du continent. L’Afrique est devenue un marché prometteur pour les investisseurs en raison de sa démographie. Alors qu’en 1930 le continent africain ne comptait qu’environ 150 000 habitants, la conjonction de la baisse de la mortalité infantile, de l’allongement de la durée de vie et du maintien d’une natalité importante a permis en moins d’un siècle l’explosion de la démographie africaine. Un terrien sur six (soit 1,2 milliard de personnes) vit aujourd’hui sur le continent africain, en 2050, ce sera 1 sur 4. La croissance démographique décélère ou se stabilise partout dans le monde, sauf en Afrique. En 2050, selon le scénario moyen des projections de la division de la population des Nations Unies, il y aura sur terre 10 milliards d’habitants, dont 2,4 en Afrique. En 2100, le continent africain devrait abriter 4,4 milliards de personnes, soit près de 40 % de la population mondiale.
Cette population, majoritairement jeune, ouvre une fenêtre d’opportunités connue sous l’appellation de « dividende démographique ». Cette notion est définie comme le surplus de la croissance économique résultant de la supériorité en nombre des personnes actives sur les personnes ne travaillant pas. La jeunesse de la population contribue en effet à l’abondance de main-d’œuvre, qui représente l’un des potentiels les plus importants pour une industrialisation à forte intensité de main-d’œuvre. Selon le site Africarenewal on line, le salaire horaire en Afrique est inférieur à 50 cents (il est par exemple de 0,27$ au Mozambique, 0,34$ au Nigéria et 1,62$ au Maroc), à comparer à 10,49$ au Royaume-Uni, 7,25$ aux États-Unis et 6,57$ au Japon. D’après la Harvard Business Review, l’Afrique devrait capter la majeure partie des 85 à 100 millions d’emplois manufacturiers à faible coût et à forte intensité de main-d’œuvre que la Chine perdrait d’ici 2030. L’Afrique pourrait ainsi, grâce à sa démographie, suivre l’exemple chinois du 20è siècle.
Outre la composante démographique, l’importance des ressources naturelles, celle des terres cultivables et de l’ensoleillement sont également des atouts spécifiques du continent africain, qui conduisent les investisseurs à privilégier des secteurs et des pays. Des secteurs cibles : l’énergie tout d’abord, suivie par les services financiers, puis par les transports, l’agriculture, l’industrie, la santé, les télécoms et, enfin, le BTP et la grande distribution. Des pays cibles : cette année selon une étude d’Havas-Horizons, les pays jugés les plus prometteurs par les investisseurs sont, dans l’ordre, la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Nigéria, le Ghana et l’Afrique du Sud [1].
Le récent succès des fonds de capital-investissement
Autrefois seuls les fonds publics, multilatéraux ou bilatéraux assuraient le financement des investissements en Afrique. Or, le développement économique des pays d’Afrique passe par celui des PME et des ETI, dont la taille était trop faible au regard des moyens à mettre en œuvre pour leur analyse financière. Les bailleurs de fonds se sont reposés sur l’intermédiation des banques de développement nationales, sans grand succès. Les banques de développement multilatérales (BAD, BOAD, BDEAC), à l’instar des bailleurs internationaux, n’étaient pas dimensionnées non plus pour le financement et le suivi des projets de petite taille. Les institutions de microfinance ont contribué au financement de projets, mais la taille et le potentiel des projets concernés relevaient davantage de la survie individuelle d’une famille ou d’une micro-entreprise que d’une véritable stratégie d’investissement et de développement.
Le paysage a considérablement changé ces quinze dernières années, grâce à la multiplication des fonds de capital-investissement actifs, organismes qui détiennent collectivement des actifs financiers, c’est-à-dire de titres de propriété, des actions ou encore des contrats et peuvent rapporter des revenus ou des gains en capital à leurs détenteurs, en contrepartie d’une certaine prise de risque. Selon l’Association africaine de capital-investissement et de capital risque (AVCA), les fonds de capital-investissement actifs en Afrique ont levé 2,4 milliards de dollars durant le premier semestre 2018, 60 % de ces levées de fonds ayant été réalisées par des véhicules d’investissement dédiés aux infrastructures. En Afrique de l’Ouest, les principaux fonds actifs dans la région sont, dans le désordre, Investisseurs & Partenaires, Emerging Capital Partners, AfricInvest, Amethis Finance, Cauris Invest, Phoenix Capital Partners ou encore Adenia Partners. Mais il existe également des fonds multi-pays dont l’activité africaine est significative : Partech Africa, PAI Partners, les fonds d’investissements climatiques, le FISEA, et en Allemagne le récent « Compact with Africa », sans oublier les fonds de pension africains qui ont un bel avenir sur le continent, ni les plateformes de crowdfunding comme Afrikwity et Cofundy. Et Proparco, la filiale secteur privé de l’Agence Française de Développement, associée dans plusieurs fonds actifs, joue un rôle important dans le financement des start-ups africaines.
Une forte rentabilité potentielle, en relation avec un niveau de risque élevé
Un rapport de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement indique qu’entre 2006 et 2011, l’Afrique a enregistré le taux le plus élevé de rendement des investissements directs étrangers, soit 14 %, à comparer aux taux de 9,1 % en Asie, 8,9 % dans la région Amérique Latine et Caraïbes. Le taux à l’échelle mondiale est de 7,1 %. Selon des données conjointement produites par Ernst & Young et l’AVCA, en 2016 et 2017, le rendement de ces activités, présenté en valeur relative, a été supérieur de 76 % à celui de la référence des investissements boursiers en Afrique, qu’est le MSCI Emerging Markets Investable Markets Index.
Cette rentabilité va de pair avec un niveau de risque élevé :
- Tout d’abord, bien sûr, le risque politique (très nombreux coups d’Etat) et de gouvernance, notamment l’indice de corruption de Transparency International. Cet indice utilise une échelle de 0 à 100 dans laquelle 0 correspond à un pays extrêmement corrompu et 100 à un pays sans corruption. Selon son classement, repris par le site de la revue Jeune Afrique, en 2017, le continent africain reste la région la plus mal classéeen terme de perception de la corruption, avec un score de 32. Et pour Transparency International, il y a un lien « entre les niveaux de corruption, la défense des libertés de journalistes, et l’engagement de la société civile ». Un chiffre éloquent : en 2017, plus de 9 journalistes sur 10 tués dans le monde l’ont été dans des pays dont le score est inférieur ou égal à 45.
- La volatilité des devises et la difficulté de couvrir le risque de change afférent. A cet égard, malgré des critiques dont il fait l’objet à juste titre, le franc CFA présente des mérites qui peuvent, entre autres, soutenir les investissements en Côte d’Ivoire par exemple. A l’inverse, la volatilité du rand sud-africain et du naira nigérian contribue à fragiliser les investissements dans ces pays. Au Kenya, le shilling, stable jusqu’à récemment, subit actuellement une forte volatilité.
- Des obstacles culturels pouvant freiner l’efficacité entrepreneuriale. Mentionnons la lourdeur des procédures, la prégnance de l’informel dans les relations interpersonnelles et commerciales, l’accès difficile à une information, notamment statistique, fiable, un contexte juridique souvent peu sécurisé, même s’il convient de souligner les efforts en la matière avec le droit de l’OHADA (Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires). Toutes ces particularités contribuent à une certaine lenteur dans la mise en œuvre des décisions et des actions. Il faut « laisser le temps au temps » pour établir la confiance, sécuriser les projets et les mettre en œuvre.
Investir en Afrique, une nécessité !
Auteur du livre provocateur «Africanistan: l’Afrique en crise va-t-elle se retrouver dans nos banlieues ?», Serge Michailof met en garde contre un «péril africain» ou un «péril noir», en écho au «péril jaune» agité dès la fin du 19è siècle et qui s’est révélé être un fantasme. «A moins d’une croissance industrielle à la chinoise qui n’est pas encore amorcée dans les pays africains, il faut s’attendre à des migrations très importantes vers l’Europe d’une population peu scolarisée qu’il sera difficile d’intégrer».
En 2050, le nombre des jeunes Africains devrait culminer à 840 millions, selon les prévisions des Nations Unies. Au cours de cette même année, environ 19 millions de jeunes entreront sur le marché du travail en Afrique subsaharienne et 4 millions en Afrique du Nord. Sur 15 ans, on recensera près de 30 millions de jeunes actifs supplémentaires chaque année sur l’ensemble du continent, soit l’équivalent de trois fois la population de la Belgique. Selon l’auteur précité, « Outre les violents troubles sociaux et politiques qu’elle pourrait engendrer, la perte d’espoir ne laissera pas beaucoup de choix aux centaines de millions de jeunes désœuvrés. Une partie d’entre eux se convertira au fondamentalisme religieux ». La Banque mondiale note en effet que 40 % des personnes qui adhèrent à des mouvements extrémistes sont motivées par le manque d’opportunités économiques.
Pour éviter ce tableau apocalyptique, que peut faire aujourd’hui la communauté internationale ? Investir en Afrique, certes, mais pas de n’importe quelle manière. Un certain nombre de mesures d’accompagnement conditionnent le succès des investissements et le développement économique du continent. A notre sens, ces investissements seront couronnés de succès sous trois conditions : la formation d’une élite qui restera et investira sur place, la mise en place des infrastructures adaptées partout sur le continent africain, et la mise en œuvre d’une stratégie de long terme, visant à tenir compte de certaines des pesanteurs culturelles, notamment de la situation des femmes.
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La formation d’une élite qui restera et investira sur place
Dans de nombreux pays africains francophones, il existe de longue date une élite bien formée, souvent issue de nos universités, voire même de nos grandes écoles. Hélas pour l’Afrique, la plupart de ces personnalités, hormis en exerçant des postes politiques ou administratifs importants, n’ont guère travaillé dans les entreprises de leur pays, faute de domaines professionnels à leur mesure et d’investissements en rapport. Les plus anciens avaient, en effet, reçu l’héritage d’une formation « coloniale » visant surtout à les préparer à des postes de haute administration. L’Afrique du Sud a mieux réussi à fixer ses élites sur place, notamment grâce à la politique volontariste du « Black empowerment » et des quotas introduits dans les grandes entreprises du pays.
Une vraie politique de développement des entreprises africaines passe par le développement de formations africaines de haut niveau. Des universités réputées, parfois issues de grandes écoles ou universités européennes, existent déjà de longue date dans plusieurs pays : Sénégal, Maroc, Tunisie notamment. Cependant, la formation qui y est dispensée n’est pas toujours adaptée à une carrière en Afrique, car empreinte de la culture européenne. Les écoles de management ont eu peu de succès auprès des élites africaines, sans doute car leurs enseignements ne sont pas adaptés aux spécificités du continent. L’INSEAD recrute peu d’Africains et peine à s’implanter sur le continent africain comme elle l’a largement fait en Asie et au Moyen Orient.
Aujourd’hui, l’intérêt du monde économique pour l’Afrique s’accompagne de la mise en place de formations professionnelles de haut niveau, adaptées au contexte africain et aux débouchés de ce continent. Ainsi, Carnegie Mellon, Harvard ou Wharton lancent ou soutiennent des programmes pour former une élite africaine destinée à rester sur place. Le Rwanda se veut à la pointe : la Tower House de Kigali est l’une des têtes de pont de la nouvelle élite africaine. Cet immeuble, hérité de l’ancienne compagnie des télécoms du Rwanda, abrite en effet depuis 2011 l’unique antenne africaine de l’une des plus prestigieuses universités américaines, la Carnegie Mellon University (CMU). Le cursus, pris en charge à 100 % par le gouvernement rwandais, permet à trente étudiants triés sur le volet de décrocher un master en technologies de l’information ou en ingénierie informatique.
En 2019, deux autres initiatives dans ce domaine lanceront une nouvelle phase d’opérations : le projet Tuning Africa est un processus collaboratif qui revoit et modernise les compétences et aptitudes, en adaptant davantage les programmes et l’enseignement aux besoins des entreprises africaines et du marché du travail. Il concerne 104 universités dans 41 pays et couvre huit domaines différents, allant de l’agriculture à la médecine. Plus de 1 600 étudiants et membres du personnel ont déjà suivi des ateliers et des cours en ligne. L’initiative « Harmonisation de l’assurance qualité et de l’accréditation de l’enseignement supérieur africain » renforce l’assurance qualité dans l’enseignement supérieur et instaure une confiance mutuelle, en soutenant la mobilité et la reconnaissance des qualifications, contribuant ainsi au programme d’intégration continentale.
La formation des élites africaines devra aussi être assortie d’une formation à tous niveaux des personnels : ingénieurs et cadres intermédiaires dans les secteurs porteurs du développement des pays (NTIC, agronomie, santé, énergie etc…), juristes OHADA et en droit international, etc. mais aussi mise en place de circuits de formations spécifiques pour les apprentis et les indépendants. En outre, la force du continent que représente sa main d’œuvre abondante, ne sera pleinement exploitable qu’en association avec les progrès de l’Intelligence artificielle et de la robotisation. La combinaison technologie-main d’œuvre est en effet la clé de la compétitivité future.
Une fois formés, les dirigeants devront être incités à investir dans leur pays, et accompagnés, avec l’appui des diasporas et des réseaux d’accompagnement. C’est aussi à ce niveau que les fonds de capital-investissement ont un rôle à jouer, accompagnés par des dispositifs qui peuvent s’inspirer des nôtres : BPI, réseaux de Business angels issus de la diaspora, réseaux d’accompagnement entrepreneuriaux, incubateurs, pépinières, couveuses, boutiques de gestion, prêts d’honneur, etc.
Des mécanismes de défiscalisation des investissements sont également à étudier pays par pays pour permettre aux grandes entreprises et aux grandes fortunes d’accompagner les start-ups et les ETI.
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La nécessité de mettre en place ou de renforcer les infrastructures, notamment numériques
Les pays dotés d’infrastructures de transport, aéroportuaires, portuaires et routières ont une longueur d’avance sur les pays enclavés. Cette situation n’empêche pas des petits pays comme le Rwanda de se positionner en pointe sur des secteurs plus immatériels et sur l’innovation.
Les infrastructures de télécommunications (internet et mobile), déjà bien développées dans de nombreux pays, ont commencé à révolutionner le mode de vie des Africains. Le smartphone fait partie de la vie quotidienne des classes moyennes : selon le cabinet Deloitte, le continent comptera 660 millions d’habitants équipés d’un « téléphone intelligent » en 2020, soit deux fois plus qu’en 2016.
L’achat en ligne reste freiné par les problèmes de livraison et de stockage ainsi que par le coût de l’acheminement, mais aussi par les difficultés de repérage local et d’adressage. Jumia, créé par deux français anciens de Mac Kinsey, se veut le leader du e-commerce africain. Après un succès dans le domaine de la réservation hôtelière en ligne, Jumia se heurte aux difficultés du e-commerce en Afrique : infrastructures déficientes, problèmes de sécurité, sous-bancarisation de la population, faible pénétration d’Internet… Présent dans 14 pays africains, il couvre 80 % de la population ayant accès à internet en Afrique et devrait dépasser le milliard d’euros de volume d’affaires en 2019. Son concurrent américain Amazon étant absent du marché, Jumia est surnommé parfois l’« Amazon africain » ou encore l’« Alibaba africain ». Plus de 3 000 personnes travaillent directement avec Jumia, et presque 100 000 personnes indirectement sur le continent africain. Jumia sert ainsi de relais africain aux grands distributeurs : Jumia et Carrefour ont signé un partenariat global au mois de novembre 2018 pour vendre des produits Carrefour sur la plateforme Jumia. Le développement des moyens de paiement en ligne par mobile a offert à cette société une très grande opportunité de croissance, et peut servir de modèle pour d’autres initiatives comme AfriMarket.
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La mise en œuvre d’une stratégie de long terme, visant à tenir compte des pesanteurs culturelles et notamment l’accompagnement des femmes entrepreneures
Nous avons déjà évoqué plus haut la nécessité de relations interpersonnelles et de « laisser le temps au temps » en Afrique. Un autre enjeu est à envisager dans une perspective de long terme : le rôle crucial des femmes africaines. Bien qu’encore trop souvent cantonnées au foyer par une descendance nombreuse, elles détiennent le taux de création d’entreprises le plus élevé au monde, selon une étude publiée du cabinet de conseil en stratégie Roland Berger : 24 % des femmes africaines créent leur entreprise, soit un taux plus élevé qu’en Amérique latine et aux Caraïbes (17 %), en Amérique du Nord (12 %) et en Europe et Asie centrale (8 %). Le cabinet Roland Berger précise cependant que l’écart est significatif dans le domaine de l’entrepreneuriat féminin entre l’Afrique subsaharienne (26 %), et l’Afrique du Nord (8 %). L’étude estime par ailleurs que l’apport de l’entrepreneuriat féminin à l’économie est considérable : entre 150 et 200 milliards de dollars de valeur ajoutée sont créés par ces femmes africaines, estime l’étude Roland Berger. Mais les obstacles ne manquent pas : 39 % des entrepreneures cessent leur activité par manque de profitabilité, et 15 % parce qu’elles n’ont pas accès aux financements nécessaires pour se développer. D’où l’intérêt d’un meilleur accompagnement spécifique des entrepreneures africaines.
Pour conclure,
- Les perspectives de l’investissement privé en Afrique sont importantes, à condition de bien choisir les secteurs et les pays et d’assortir l’investissement d’un certain nombre de mesures d’accompagnement en matière de formation, d’infrastructures et d’adopter un horizon de long terme. La rentabilité potentielle est à la mesure du risque encouru, dont le principal demeure le risque politique.
- La communauté internationale s’y intéresse aujourd’hui fortement, et ce en dépit du risque élevé encouru. La motivation de cet intérêt pour l’investissement en Afrique est non seulement de tenter d’obtenir des rendements élevés dans un contexte international de taux de rendement faibles, mais également la conscience qu’en l’absence de développement du continent africain, elle devra faire face à des afflux migratoires considérables liés à l’explosion démographique africaine.
[1] Selon le classement Forbes de 2019 : Maurice, Afrique du Sud, Maroc, Seychelles, Tunisie, Botswana, Rwanda, Kenya, Ghana, Egypte. Selon le classement de Rand Merchant Bank : Egypte, Afrique du Sud, Maroc, Ethiopie, Kenya, Rwanda, Tanzanie, Nigeria, Ghana, Côte d’Ivoire.
- Investir en Afrique : opportunités et nécessité - 14 mars 2019
Une coquille, il faut lire 150 millions d’habitants en 1930 et non 150 000.