L’émergence des médias repose sur des personnes dont les innovations se sont montrées fondamentales au plan technologique. Certains étaient de purs chercheurs, d’autres y ont ajouté des qualités d’entrepreneurs. Nous avons fait le choix de nous limiter à un moment fondateur : celui de l’émergence des ondes et de leurs applications, qui conduiront à la radio et la télévision. Comme tout choix, il est restreint et potentiellement critiquable : bien d’autres grands noms dans de nombreux médias ont existé, par exemple en communication sonore (don Gauthey), en téléphonie (Charles Bourseul, Antonio Meucci, Graham Bell, Elisha Gray, Thomas Edison), en photographie (Nicéphore Niepce, Louis Daguerre), en enregistrement musical (Emile Berliner), en cinéma (Léon Bouly, Auguste et Louis Lumière, Charles Pathé) ; et tous ces créateurs n’étaient pas seuls, largement aidés par d’autres chercheurs ou praticiens.

La théorie générale des ondes et l’avancée vers la TSF et la radio

L’humanité connaît depuis longtemps certaines propriétés électrostatiques, comme celles de l’ambre ; Thalès (-626, -547) les a étudiées. En 1672 Christian Huygens développe une première théorie ondulatoire de la lumière, suivi 150 ans plus tard par Augustin Fresnel (1821) ou Léon Foucault en 1850 ; la loi de Charles-Augustin Coulomb existe depuis 1785, les travaux d’André-Marie Ampère datent de 1820, ceux de Michaël Faraday de 1831. Manque l’unification : l’approche globale, la théorie générale des ondes, est due à James Clerck Maxwell (1831-1879), dont les successeurs développeront les travaux et les mettront en application, dans l’intérêt, entre autres, de nouveaux médias permettant de transporter à distance la voix et l’image mobile. En effet, l’onde sera le support de transmission du son (TSF, radio) ou de l’image mobile (télévision).

James C. Maxwell

James Maxwell est un mathématicien et physicien écossais, aux centres d’intérêt allant de la théorie des couleurs – en 1861, professeur au King’s College de Londres, il réalise la première photographie en couleurs – à la thermodynamique, en passant par l’électromagnétisme. Son apport fondamental est d’établir une théorie générale montrant l’unicité des ondes connues, son, lumière, etc, en une seule onde électromagnétique. Sa théorie est publiée en articles en 1865, en livre en 1873. Ses successeurs en vérifieront la véracité par l’expérience. La puissance mathématique de Maxwell lui permet d’écrire un système de vingt équations, que les progrès des mathématiques aideront à simplifier : dans son livre de 1873, le nombre d’équations est déjà réduit à 8, puis à 4 par le physicien anglais Oliver Heaviside (1884), à l’aide des équations vectorielles et des opérateurs divergence et rotationnel ; il devient 2 avec la théorie des tenseurs, et enfin une seule équation, multi-vectorielle, par l’algèbre géométrique. Maxwell meurt à 48 ans, en 1879, année de la naissance d’Albert Einstein ; ce dernier n’aura, dans son bureau, que deux portraits : Newton et Maxwell.

Les apports de Maxwell seront approfondis et exploités par de grands scientifiques purement universitaires et chercheurs ou ingénieurs-inventeurs devenant des hommes d’affaires. Dans la chaîne menant à la création de la radio, nous faisons le choix, arbitraire comme tout choix, de n’évoquer que Branly, Braun, de Forest, Hertz, Marconi, Popov, cités ici par ordre alphabétique, sans oublier Edwin Armstrong, inventeur de la modulation de fréquence (FM) en 1933 ou Nikola Tesla. Ces savants ont réussi bien d’autres travaux, nous ne présentons succinctement que ceux qui ont conduit à la transmission à distance d’un signal par les ondes.

Heinrich Hertz (1857-1894) est un physicien allemand, professeur à Karlsruhe puis à Bonn. Fin 1886 et début 1887, il confirme la théorie de Maxwell en démontrant réellement l’existence des ondes électromagnétiques, leurs propriétés dans l’espace et leur propagation à la vitesse de la lumière. Il crée des ondes électromagnétiques à l’aide d’un solénoïde, émetteur d’ondes à étincelles, et les détecte par un récepteur situé à quelques mètres. Ces ondes invisibles allant d’un point de départ, émetteur, à un point d’arrivée, récepteur, marquent la naissance de la télégraphie sans fil (TSF) et de la radiodiffusion. Elles prendront plus tard le nom d’ondes hertziennes.

Edouard Branly (1844-1940) est docteur en médecine et physicien, et à partir de 1876, professeur à l’Institut Catholique de Paris. Le 20 novembre 1890, il découvre la radioconduction c’est-à-dire la commande à distance.

Gugielmo Marconi (1874-1937) est physicien ; son père est italien, sa mère est la petite-fille de John Jameson, fondateur en 1780 de la distillerie de whisky irlandais Jameson à Dublin. Son ascendance maternelle l’incitera à aller souvent en Angleterre lorsque ses projets ou idées ne trouveront pas d’écho favorable en Italie.  Très vite passionné par les ondes électromagnétiques, il maîtrise les travaux de Hertz et Branly sur les ondes et cherche à les appliquer aux communications à distance.

« Bricoleur » de génie, il met au point, fin septembre 1895 – à 21 ans – une première transmission « sans fil » de 2,5 km. Il dépose un brevet en 1896, fonde sa société, la Wireless Telegraph & Signal Company. Le 18 mai 1897 a lieu une liaison de 14 km du Pays de Galles jusqu’à l’Angleterre, au-dessus du canal de Bristol ; puis vient la construction d’une station côtière à la Spezia, entre Gênes et Pise, et la transmission vers un navire situé à 16 km ; le 27 mars 1899, il réalise la traversée de la Manche entre Douvres et Wimereux, près de Boulogne. En 1901, il relie le continent et la Corse, puis les Cornouailles à Terre-Neuve au-dessus de l’Atlantique.

Le succès est là : le système de communication à distance, la télégraphie sans fil, est adopté par les flottes maritimes militaires et civiles, appuyées par les grandes compagnies d’assurances qui y voient une sécurité accrue. Marconi obtiendra le prix Nobel de physique en 1909, partagé avec Ferdinand Braun, pour leurs contributions au développement des communications par radio. Outre ses réussites scientifiques, il devient un riche industriel et homme politique, sénateur en 1914, anobli en 1929, et fervent admirateur de Mussolini.

Néanmoins, toutes les communications à distance utilisent encore le système électrique de Samuel Morse des années 1850. L’américain Lee de Forest (1873-1961) – plus de 300 brevets – conçoit la lampe triode, à trois composantes : une cathode, une anode, et une grille entre les deux, le tout dans le vide. La triode permet d’amplifier un signal électrique et donc de reproduire et transmettre les vibrations de la voix humaine. En parvenant à transmettre paroles et musiques, ce que ne savait pas faire le Morse, la TSF se transforme en radio, au sens du média.

Le physicien allemand Karl Ferdinand Braun (1850-1918), co-lauréat du prix Nobel 1909 avec Marconi pour ses travaux sur la télégraphie sans fil, parvient en 1898 à étendre la puissance des émetteurs de Marconi. En outre, il invente en 1897 l’oscilloscope, première étape vers le tube cathodique dont il est considéré comme le créateur, utilisé dans les téléviseurs et les premiers écrans d’ordinateurs.

Le dernier nom de cette liste est celui du russe Aleksander Popov (1859-1906), professeur à l’Université de Saint-Petersbourg ayant mené divers travaux parallèles à ceux de ses collègues occidentaux. Pour la radio, son apport majeur est de concevoir la notion d’antenne filaire (1893), essentielle pour la transmission. Querelle de savants ? En 1900, Popov déclare, lors du Congrès des ingénieurs électriciens de Russie, que l’émission et la réception de signaux par Marconi via les oscillations électriques n’a rien de nouveau. Il a raison : aux Etats-Unis, le célèbre ingénieur serbo-américain Nikola Tesla en a effectivement fait la démonstration dès 1893 à l’aide d’un émetteur de 15 kHz, très puissant pour l’époque, conçu en 1889. En Angleterre, le bengalais Jagadish Chandra Bose (1858-1937) réalise des expériences analogues de transmission, en 1894, pour faire sonner une cloche à distance ou faire exploser de la poudre.

Dernier impact de la révolution des ondes, celui sur la formation aux nouvelles théories ou nouveaux métiers de l’électromagnétisme, depuis l’ingénieur jusqu’au technicien. Les travaux de Maxwell et de ses successeurs entrent rapidement dans les programmes de l’enseignement supérieur, les laboratoires publics ou privés s’en emparent, le nombre de doctorats augmente, l’emploi aussi. En 1878, en France, est fondée l’Ecole Supérieure de Télégraphie (EST) qui prend le nom, en 1888, d’Ecole professionnelle supérieure des Postes & Télégraphes (EPSPT), puis en 1912 d’École supérieure des Postes & Télégraphes (ESPT). En 1938 elle s’appelle Ecole Nationale Supérieure des Postes et Télécommunications, et devient en 1942 l’Ecole nationale supérieure des Télécommunications (ENST), la future Telecom Paris.

Le domaine des ondes électromagnétiques, de leur conception à leurs utilisations opérationnelles, est devenu un sujet majeur. A la fin de la première décennie du XXe siècle, tous les maillons du monde des ondes invisibles sont en place. En 1910, il est possible de transmettre des messages, en paroles ou musicaux, par ondes hertziennes à des distances de plus en plus longues. Ces ondes sont un média nouveau, au sens de moyen technique autorisant la communication à très grande distance, mais le média de divertissement que sera la « radio » est encore loin. Les premiers usages de la TSF (Télégraphie sans fil, au sens de radio-transmission à distance par ondes) sont la sécurité de l’industrie navale, exigée par les grandes compagnies d’assurance, et les services de transmission et de communication entre les lignes pendant la guerre mondiale 1914-1918.

Apparition de la radio en France : le rôle de Gustave Ferrié

Gustave Ferrié

L’Ecole Polytechnique, qui dépend du ministère de la Guerre, forme des promotions d’ingénieurs-officiers de très haute qualification, capables de suivre les évolutions des techniques de TSF. Gustave Ferrié (1868-1932) est de la promotion 1887. Il opte pour le Génie ; passionné de TSF, il devient instructeur de l’école de télégraphie militaire du Mont Valérien, créée en 1884 (à ne pas confondre avec l’EST), qu’il dirige à partir de 1897 ; il est nommé à la tête de la commission interministérielle chargée de suivre les essais radioélectriques de Marconi à Wimereux. En août 1900, il présente lors du Congrès international d’électricité tenu à Paris, dans le cadre de l’Exposition Universelle, une communication sur « L’état actuel et les progrès de la télégraphie sans fil », où il rend hommage à Hertz, Branly, Marconi, et à un de ses collaborateurs, le lieutenant de vaisseau Camille Papin Tissot. En 1901, en collaboration avec le général Boulanger, il publie son premier ouvrage, chez l’éditeur Berger-Levrault, intitulé La télégraphie sans fil et les ondes électriques.

En 1900, le ministre de la Guerre, refusant de lier la France à la seule technologie de Marconi, demande à Ferrié de développer la TSF militaire française. En 1903, il invente un nouveau récepteur et installe une antenne au sommet de la tour Eiffel, d’une portée initiale de 400 km, puis 6000 km en 1908. Il devient un acteur majeur de la radiotélégraphie pendant la Guerre, par exemple en optimisant les échanges émetteur-récepteur en faisant fabriquer en grande série les triodes de Lee de Forest.

Nommé général en 1919, il est élu membre de l’Académie des Sciences en 1922 – à l’unanimité – et inspecteur général de la télégraphie militaire ; il reçoit en 1931 la médaille d’honneur de l’Institute of Radio Engineers (IRE) qui deviendra en 1963 l’IEEE (Institute of Electrical and Electronics Engineers). Il est titulaire de tous les grades de la Légion d’Honneur (Chevalier en 1905, Grand-Croix le 15 février 1932, veille de sa mort).

Naissance de la radio

Après la guerre, le retour à la vie civile de nombreux techniciens ou ingénieurs multiplie les expériences, dans de nombreux pays. Pays-Bas, novembre 1919 – diffusion d’une soirée musicale par PCGG, station de La Haye -, Canada, décembre 1919 – la station expérimentale XWA, appartenant à la société Marconi Wireless Telegraph Company de Montréal, diffuse en soirée des programmes contenant informations, météo et musique -.

1920 : esquisses de programmes quotidiens locaux aux Etats-Unis, en URSS nouvellement proclamée, et en Angleterre (Marconi Company). On aura compris que Guglielmo Marconi est un inventeur de génie et aussi un homme d’affaires avisé. Le mardi 2 novembre 1920, la station américaine KDKA, créée par Westinghouse Company, réalise la première émission en direct pour l’élection présidentielle américaine et la victoire du républicain Warren Harding face au démocrate James Cox. KDKA, qui existe encore de nos jours, se décrit toujours comme « Pioneer Broadcasting Station of the World« . La retransmission par une station de la RCA (Radio Corporation of America) du match de boxe opposant Jack Dempsey à Georges Carpentier le 2 juillet 1921, à Jersey City, pour le titre mondial poids lourds toutes catégories contribue à la notoriété du média radio naissant.

En France, dès janvier 1920, le site de la Tour Eiffel passe sous la responsabilité du sous-secrétariat d’État aux Postes et Télégraphes. Des premières diffusions expérimentales ont lieu en novembre 1921 : bulletins météo, concerts, revues de presse. Le 24 décembre 1921 voit le début des émissions du poste d’Etat de la Tour Eiffel (« FL »). L’inauguration officielle de Radio Tour Eiffel a lieu le 6 février 1922, en présence des comédiens Yvonne Printemps, Sacha et Lucien Guitry.

Publicité pour les concerts Radiola (1924 ; Dom. Public)

Radiola est fondée le 6 novembre 1922 ; première station privée à émettre en France, elle a le nom de la marque Radiola d’équipements radio grand public ; vraie innovation « marketing », un nom identique désigne donc à la fois une ligne de récepteurs et une station. Radiola émet chaque jour à 17h05, commençant par les cours de la Bourse suivis d’un concert, puis par une session allant de 20h45 à 22 heures où des informations et une revue de presse laissent ensuite l’antenne à un concert. Le comité en charge des programmes comprend Paul Valéry ou Maurice Ravel. Les programmes culturels sont diffusés en direct : poèmes lus à l’antenne par la poétesse renommée Anna de Noailles, concerts donnés par l’orchestre de Victor Charpentier, création du « Journal Parlé ».

Deux dernières innovations majeures sont à porter au crédit de Radiola. La première est celle du présentateur : la station embauche un jeune acteur du nom de Marcel Laporte pour présenter et animer les émissions. Le nom de scène de Laporte est Radiolo. La deuxième innovation est celle des émissions sponsorisées : la publicité en clair étant interdite alors par l’Etat, Radiola décide de faire « subventionner » ses émissions par diverses sociétés privées du domaine de la radioélectricité.

Vers la télévision

Les prémices

Le lien entre les ondes sonores, lumineuses, électromagnétiques a été le fondement du média Radio ; ce sera aussi celui de la télévision. De multiples contributions préliminaires sont dues à Antoine et Alexandre Becquerel (photosensibilité, 1839), ou Willoughby Smith (1873), Albert Einstein (photon, 1905), Werner et William von Siemens (oeil artificiel électrique, 1876) ; sur le balayage d’une image animée, sa transmission et sa reconstitution, comment ne pas citer le français Constantin Senlecq (1842-1934), le portugais Adriano de Paiva (1847-1907), professeur de physique à l’Université de Porto, ou l’américain George Carey (1851-1906) ? Leurs appareils seront dénommés télectroscope en 1878. Le mot télévision n’apparaît qu’en 1900, dû au physicien russe Constantin Perskyi (1854-1906) lors du Congrès international d’Electricité de Paris, déjà mentionné ; le titre de sa communication est « Télévision au moyen de l’électricité ».

L’allemand Paul Nipkow (1860-1940) reprend la notion de balayage d’une image en utilisant un système composé de deux disques rotatifs à trous en spirale : la rotation du disque n°1 décompose l’image en unités élémentaires ; chaque unité envoie un flux de lumière sur du sélénium qui crée des signaux électriques ; l’image est reconstituée grâce à un disque n°2 synchronisé avec le disque n°1. Une image est analysée et reconstituée en 1/25e de seconde. Il en dépose le brevet en janvier 1885. C’est l’approche dite mécanique de la télévision ; une autre approche dite électronique s’appuiera sur les travaux de Karl Braun, de l’écossais Alan Campbell-Swinton (1863-1930), du russe Boris Rosing (1869-1933), de l’américain Philo Farnsworth (1906-1971) et du russe, naturalisé américain en 1924, Vladimir Zworykin (1888-1982) ; elle conduira au tube cathodique.

Pendant la décennie 1920-1930, période de l’émergence de la télévision, deux personnalités se distinguent : l’Ecossais John Baird et le Français René Barthélémy, tous deux à la fois ingénieurs et créateurs de services de contenus.

John Baird (1888-1946)

John Logie Baird est ingénieur en électricité. En 1925, il réalise plusieurs expériences de transmission mobile en laboratoire par l’approche mécanique. Le 26 janvier 1926, une démonstration a lieu à la Royal Institution of Great Britain, à Londres. Il reproduit, d’une pièce à l’autre, une image mobile avec 30 lignes de balayage vertical et 12,5 images par seconde ; elle est considérée par les historiens comme la naissance de la télévision. En 1927, Baird organise une transmission de Londres à Glasgow, à 700 km de distance, puis en 1928 une autre de Londres à New York. En cette même année, il réussit la première transmission en couleurs (une jeune fille avec des chapeaux différemment colorés).

Baird est aussi un homme d’affaires ; il lance en avril 1927 la Baird Television Development Company (BTDC) et en juin 1928 la Baird International Television Limited (BILT) pour de premiers programmes expérimentaux avec la BBC et le développement d’un système global, nommé Televisor, opérationnel en 1930. La BILT prend le contrôle de la BTDC, le groupe devient Baird Television Ltd. En 1932 la Baird Television est reprise par la Gaumont-British Picture Corporation. La télévision de Baird sort de Grande-Bretagne : Allemagne, en 1929, pour une expérimentation ; en France, en novembre 1929, en association avec Bernard Natan, homme d’affaires ayant repris Pathé-Cinéma. En production, Baird Television émet des programmes dès 1929 avec la BBC. En outre, le 3 juin 1931, Baird réalise le premier « live » de la BBC avec la course hippique du Derby d’Epsom.

Au milieu des années trente, la BBC crée une chaîne de télévision, la BBC Television Service, émettant à partir du 2 novembre 1936, utilisant en alternance le système de Baird, mécanique, et le système électronique de Marconi-EMI (Electric and Musical Industries). Ce dernier sera utilisé définitivement à partir du printemps 1937.

René Barthélémy (1889-1954)

René Barthélémy est ingénieur diplômé de l’Ecole Supérieure d’Electricité. Après la guerre, il entre à la Compagnie des Compteurs (CDC) comme responsable du Laboratoire Radioélectrique. En 1927, à Londres, Ernest Chamon, fils du fondateur de la CDC et futur président, assiste à une démonstration de la « télévision » de Baird. A leur retour, la CDC constitue une unité sur la télévision, dont Barthélémy est responsable de la recherche. Ses premiers travaux portent sur le transfert d’une image fixe, puis d’images mobiles, dans une logique d’approche mécanique.

Grand Amphi de SupElec, 14 avril 1931

Paul Janet, directeur de SupElec, membre de l’Académie des Sciences, invite René Barthélémy et son équipe à faire une démonstration, devant le « Tout-Paris », de leur système de télévision dans ses locaux, le 14 avril 1931. Une réussite. A la différence de Baird qui avait employé une connexion par fil au sein d’un même bâtiment, Barthélémy a son studio émetteur dans ses locaux de la CDC à Montrouge, le récepteur étant situé dans le grand amphithéâtre de Sup’Elec, rue Pierre Larousse à Malakoff, à 2 km.

La suite

Les systèmes de Baird-Natan et de la CDC ne sont pas seuls en France : des initiatives ont été lancées par Henri de France et Marc Chauvierre. Henri de France (1911-1986) compte parmi les pionniers de la télévision en France, fondateur en décembre 1931 de la Compagnie générale de télévision (CGT) pour améliorer la technologie de l’image, développant un système d’images à 60 puis 120 lignes. Il dépose en 1956 un brevet de télévision en couleurs nommé SECAM (pour SEquentiel Couleurs À Mémoire), exploité en France à partir de 1967. Quant à Marc Chauvierre (1900-1996), ingénieur de la société Integra produisant du matériel pour les récepteurs radio, il conçoit en 1932 une caméra de prise de vues d’images mobiles et un système de réception de ces mêmes, installe son propre studio de télévision expérimentale dans les locaux de Radio Lyon ; en 1936, il crée le premier téléviseur français à tube cathodique grand public.

En 1932, l’Etat souhaite avancer en matière de télévision et lance une consultation sous la responsabilité du Laboratoire National de Radioélectricité (LNR), qui a succédé à l’Ecole de télégraphie militaire. Les tests comparatifs ont lieu du 25 au 27 octobre 1932, le rapport final est remis au ministre le 7 novembre.

Le studio de la rue de Grenelle

La technologie de René Barthélémy et de la CDC est adoptée, un studio technique de 9 m², rue de Grenelle, est mis à sa disposition, l’émetteur de l’Ecole Supérieure des PTT situé dans la même rue peut diffuser les images et le son est transmis depuis Montrouge par ligne téléphonique.

Tout ceci conduira après la deuxième guerre 1939-1945, étape après étape, à la création officielle de la première chaîne de la télévision française le 29 juin 1949. Mais ceci est une autre histoire.

 

Mots-clés : médias – télévision – radio – histoire

Philippe Tassi