Changer de métier ou de secteur d’activité, se mettre à son compte, créer son entreprise, faire du management par intérim, des missions de conseil : c’est une nouvelle orientation que l’on veut donner à sa carrière. Dans ces temps de crise, de nombreux  cadres supérieurs et dirigeants y songent. Mais ce n’est pas aussi facile à faire qu’à dire …

Personne ne sait quelle sera la durée de sa vie. A partir de ce constat simple et pragmatique, je recommande une hygiène de vie professionnelle. Sachez prendre du recul régulièrement.

Tous les 5-7 ans, prenez le temps de vous poser : « Où en suis-je de ma vie professionnelle, familiale, amicale, amoureuse, … ? », « si je devais changer, là maintenant, qu’est-ce qui serait essentiel pour moi ? », « qu’ai-je envie d’apprendre, de faire, de ne plus faire ? », …

Le responsable d’une entreprise repense régulièrement la stratégie, à moyen et long terme, et décline sa vision pour l’action à court terme. L’ordonnance que je vous prescris est d’agir de la même façon pour vous-même. Il est normal d’avoir des valeurs personnelles sous-jacentes qui restent relativement intangibles, mais l’expérience et l’environnement peuvent apporter des ajustements.

Savoir être prêt en cas de changement radical, apprendre à orienter son parcours dans le sens souhaité, c’est nécessaire. Et cela d’autant plus qu’il est de plus en plus rare d’avoir une « carrière » professionnelle linéaire. Tout un chacun change d’entreprise, de métier, d’industrie, de localisation géographique. C’est parfois voulu, mais souvent la rupture est provoquée.

Si vous anticipez cette réflexion, vous serez à même d’entretenir des connaissances dans un univers donné, de développer le réseau professionnel adéquat pour faire face à toute situation (ou presque).

Soyez maître de votre destin, et du timing de mise en œuvre !

Il arrive dans la plupart des vies professionnelles un moment clé : celui où l’intéressé est conduit à envisager un changement majeur de métier, de secteur ou de type d’entreprise.

Par exemple, passer du public au privé, d’une start-up à une grande entreprise, d’un groupe multinational à une PME familiale, quitter la recherche pour rejoindre une start-up, faire du conseil.

Cela se produit souvent autour de quarante ans, lors de cette crise personnelle et professionnelle, la mid-life crisis, que nous traversons tous. A ce moment clé, la personne se rend compte en général de ses limites de temps ou d’énergie, ainsi que des contraintes. Tout peut basculer dans une vie professionnelle si ce changement échoue.

A ce moment, ou plus tard, beaucoup ressentent la nécessité de faire quelque chose de différent : quitter le salariat, se mettre à son compte, faire du bénévolat, diminuer son rythme de travail.

Un changement significatif dans une vie professionnelle ne s’improvise pas

Une bonne discipline de vie consiste à prendre le côté positif des choses. En matière de changement dans sa carrière professionnelle, il est utile de se poser les bonnes questions qui vont permettre ce changement. Trois clés permettent généralement de mettre en œuvre un changement positif.

La première relève souvent de la prise de conscience de quelque chose que l’on n’avait pas identifié préalablement. Echanger avec d’autres personnes, exploiter des outils psychologiques adaptés, vont permettre de débloquer les résistances intellectuelles au changement.

La deuxième relève à la fois d’une vision pragmatique et opérationnelle. Le changement s’opère en effet souvent par étapes. Renouveler sa garde-robe, changer de coiffure, faire un voyage d’études sont des éléments qui peuvent faciliter, par touche successive, le mindset nécessaire. Nombre de personnes prennent difficilement leur téléphone pour obtenir un rendez-vous, c’est pourtant indispensable pour mettre en œuvre la démarche réseau qui leur apportera leur prochain job.

Enfin, le plaisir est la base d’un changement heureux ! S’adapter en permanence au monde qui nous entoure, rester en veille, chercher à étonner ses proches, ses collègues, permet de travailler sa résilience et sa longévité professionnelle. Le refus du changement provoque souvent la rupture, voire la crise. Si vous y prenez du plaisir, vous serez efficace.

Si le changement est subi, en cas de licenciement par exemple, l’intéressé peut alors ressentir le besoin de faire prendre un tournant à sa vie professionnelle. Dans ce cas et quel que soit son âge, il a tout intérêt à négocier avec son employeur la prise en charge d’un accompagnement adapté (outplacement) dans le cadre d’une éventuelle transaction. Ceci lui permettra de construire ou d’affiner son projet professionnel avant d’entamer sa nouvelle vie.

Si le changement est souhaité, l’intéressé est en poste et souhaite prendre un tournant dans sa vie professionnelle. Il se trouve alors devant un dilemme :

  • ou bien il a trouvé un nouvel emploi, mais alors comment être sûr que ce changement lui sera bénéfique à long terme ?
  • ou alors il n’a pas encore trouvé son nouvel emploi, mais alors comment le rechercher tout en étant en poste ?

Dans tous les cas, un minimum de réflexion et de préparation s’impose ; connaître ses forces et ses faiblesses, être clair avec soi-même sur ses freins et ses moteurs, ainsi que sur ses motivations profondes, se fixer des objectifs à 5 ans, à 10 ans est incontournable.

La bonne nouvelle ? Avec une bonne expérience de la vie et des rapports humains, il est tout à fait possible de réaliser de beaux projets sans pour autant en avoir la maîtrise technique. Les soft skills, les compétences interpersonnelles sont aussi capitales.

Et si la conjoncture ou les circonstances vous font renoncer, sachez que ce renoncement est souvent temporaire. En effet, trois principales raisons font décaler la décision. L’aversion au risque, la crainte du lendemain, de son conjoint et/ou de soi-même est le premier blocage : avec le temps, les enfants grandissent, les inquiétudes peuvent s’atténuer. La deuxième raison est financière. Je n’ai pas les moyens de réaliser ce rêve, par exemple de prendre un métier moins payé ou de devenir entrepreneur. Peut-être puis-je passer par une étape plus « alimentaire » et économiser ? Enfin, la conjoncture peut être défavorable, ce n’est pas le bon timing. L’autre bonne nouvelle, la conjoncture change elle-même et parfois même dans le bon sens 😊

Vous pouvez vivre votre rêve ! Alors, partez à la chasse au rêve …

Marie et Bruno (prénoms modifiés) sont deux exemples de changement significatif ; l’un autour de la quarantaine, l’autre bien plus tardif. Ils participent à la fois du changement voulu et subi. De nombreux autres exemples pourraient être présentés avec des changements de toute sorte : métier, industrie, géographie, environnement contractuel et sociétal, … et s’il est souvent prudent de changer un axe à la fois, j’ai aussi observé des mouvements plus ambitieux. La recherche de sens et de plaisir fait régulièrement passer du projet de la raison au projet du cœur !


A la recherche du sens : Marie 

« Je suis fille d’entrepreneur et cela a de l’importance pour la suite de ma carrière. Mon père a débuté comme artisan peintre à 14 ans puis il a monté une entreprise qui comptait 70 personnes à la fin. Moi, j’ai fait des études en école de commerce et j’ai eu l’occasion de travailler à l’étranger aux USA, en Grande-Bretagne puis en Allemagne en tout début de carrière. De retour à Paris, je décroche un job dans l’univers musical avant d’être chassée pour un des plus grands groupes dans l’agro-alimentaire, au tout début de la success story d’une de ses activités. »

En réalité, il s’agit de lancer l’activité, de tout créer tout en étant adossé. Créer le back-office, le plan marketing, le centre d’appel, les premières boutiques … Aujourd’hui, cette activité représente près de 3 milliards de CA dont un quart en France.

Marie atteint son pic de carrière à moins de 40 ans et s’interroge. Elle accepte la proposition de rejoindre une grosse PME, avec la contrainte d’emmener mari et enfants dans une ville de province. « J’étais très enthousiaste mais peut-être suis-je allée un peu vite et en voulant créer une rupture trop radicale. » Bref, Marie se retrouve sans emploi, avec sa famille, dans une ville de 100.000 habitants. Elle revient alors vers son projet d’entrepreneuriat, prend le temps de réfléchir à sa cible et au secteur. En effet, toute reprise prend du temps, souvent 2 à 3 ans. Marie trouve et conclut en 18 mois l’acquisition d’une société qui vend des produits pour le 3ème âge. Elle a finalement réuni sa famille dans une autre ville, de moins de 20.000 habitants. « Le sens de mon travail est important et les valeurs de partage et de convivialité au sein des équipes sont également capitales. »


L’heure du choix : Bruno

« J’ai 55 ans aujourd’hui. Mais déjà à 25 ans, j’ai dû faire un choix dans un panel d’opportunités très ouvert : rester au Brésil où j’avais passé 2 ans ? Me lancer dans la photo ? Devenir agronome ? Me marier ? Reprendre l’exploitation agricole familiale ? J’ai finalement opté pour un retour en France, le mariage et une recherche d’un emploi stable. Mais cette première période de ma vie avait déjà fait germer une petite graine en moi. »

Dans une période de restructuration du grand groupe international où travaille Bruno, lui est annoncée la suppression de son poste. Il ouvre alors ses chakras, se fait aider dans sa réflexion, relance un projet d’exposition au Brésil, s’occupe de ses enfants, et rencontre des gens investis dans l’entrepreneuriat social. Il décide alors de se mettre à son compte.

« Ce secteur allait me permettre de valoriser mes 30 ans d’expériences professionnelles tout en retrouvant un espace d’innovation. Selon moi, ce sujet méritait que je m’y investisse une dizaine d’années et si je pouvais en vivre, ce serait parfait. J’ai alors d’idée de proposer aux entreprises dans le cadre de RSE d’innover et de faire travailler des entrepreneurs sociaux dans leur projet. Mon ancien employeur est aujourd’hui l’un de mes premiers clients.

Aujourd’hui, j’ai les moyens de mes rêves. Je retrouve une certaine liberté de choix avec un positionnement d’adulte. J’ai envie de passer du statut de « pauvre senior viré » à une image de quelqu’un qui « fait envie ». Je suis dans une liberté qui rend libre ceux qui sont autour de moi. 

 Je n’envisage plus la date butoir de la retraite : c’est un monde de possibles, je redécouvre une dynamique de création, d’innovation avec tous les gens que je fréquente… même si j’ai encore la contrainte de faire vivre la famille. Le boulot n’est qu’un élément, du coup c’est beaucoup plus riche. »

Olivier de Conihout
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